A la différence de Nuptiales qui contient beaucoup de duos image et texte, Un pas de plus prend plus de liberté : photographies sans texte, texte relatif à deux ou trois images, un texte seul sur la première page d'un chapitre, les variantes sont infinies. La taille du livre (format et nombre de pages) le permet.
Belgique, 1976
Vous avez incrusté une scène de mariage dans votre Géométrie. C’est que le mariage en est une, exemplaire…Même, et surtout, quand les relations entre points et courbes, surfaces et volumes, y ont connu des mésaventures d’un autre ordre. Quel dommage ! A bien y réfléchir, le mariage n’est concevable que pour les esthètes. Il y en a si peu. Car il suffirait d’avoir l’amour des lignes harmonieuses, des tracés heureux, des points de rencontre justes pour que tout aille sur la voie céleste. C’est en principe ce que scelle un sacrement. Mais depuis que La Bruyère vint murmurer, à propos des mariages : « Je n’en connais pas de délicieux. », une sourde brûlure persiste. Et la volupté de certains mots cache d’autant moins l’inconstance, la ruse, la tromperie, le détournement. Que de ronces dans le destin des mots eux-mêmes !
Qu’un triangle a de mérite, soudain, à conserver deux angles égaux ! Géométrie naïve, imagerie reposante, douce coulée des eaux sous les ombrages pudiques.
Géométrie campagnarde…
Et vous avez, en diagonales pertinentes et gracieuses, ponctué le bonheur de deux êtres ; la présence de petites filles élégantes devrait à jamais éloigner les orages. Les symboles nous aident à comprendre ; l’homme s’en est fait une sorte de délégation onctueuse qu’il ne devrait pas oublier. Et si la fête invite les visages à se tourner vers le centre, point d’or de la géométrie, c’est bien que le sacrement se prononce de lui-même.
Cet état de grâce ne nous renvoie-t-il pas aux tourments de nos apprentissages scolaires trop immédiatement portés sur le rendement intellectuel avant de donner à rêver sur une figure ?
France, 1986
Yvelines, 1976
Jura, 1997
Yvelines, 1975
Sur vos Chansons madécasses le même soleil qui venait saupoudrer les objets, les meubles, quand j’appris votre mort, en 1937, par une voix radiophonique…
C’était dans une pièce qui tenait lieu de salon, appartement modeste de mes parents, où je souffrais de varicelle que l’on soignait à l’époque avec d’horribles tisanes qui ont ancré leur souvenir dans ma tête d’enfant. Ce n’était pas une nouvelle tragique, seulement un communiqué mélancolique, comme vos Chansons venues d’une grande île lointaine nous ramènent les embruns mêlés d’amour et de mort. Mais « le chant plaît à mon âme » y entend-on, je ne le savais pas en ce temps-là, je sentais qu’un monsieur lointain lui aussi, définitivement lointain, ne pourrait plus jamais s’approcher de moi, dans la grande allée d’un jardin rêvé, pour passer sa main sur mes cheveux.
J’aime ce peu de soleil tamisé glissant sur une belle partition discrète et émue dont les notes retournent aussitôt à l’ombre des véritables musiques.
Haute-Loire, 2007
Les vaches s'inscrivent dans une attente indiscernable où resurgissent rites et clameurs qui réduisaient le feu de la parole. Princesses de silence, elles partagent l'ombre et la lumière en courbes épousées; un arbre se penche, et veille sur ces songes tranquilles baignés d'une eau d'éternité.
Solène, Isère, 2002
Yvelines, 1977
Je mets de l’ordre jusqu’en ces ombres qui fragmentent une harpe sur des marches de pierre.
© Philippe Le Bihan - 2007-2024